L’icône de la femme tueuse en série fascine.

Kelleher MD, Kelleher CL (1998), dans "Murder Most Rare", résument: « Parce qu’elle prend délibérément pour cible ceux qui ont confiance en elle, les crimes de ce genre de tueuses violent nos conceptions fondamentales sur l’amour, la loyauté, la maternité et l’amitié » : la tueuse en série fascine car elle vient bouleverser toutes les représentations traditionnelles de la femme.

Mais qu’est ce qu’un tueur en série ? (Douglas, Burgess, Burgess et Ressler (1992), définissent le tueur en série comme une personne qui a commis au moins trois meurtres, avec un intervalle de temps — de quelques jours à plusieurs années — séparant chacun de ces meurtres, et qui réalise un certain niveau de satisfaction par la mort de sa victime.

Les tueurs en série sont rares, les tueuses en série encore plus. Selon Laurent Montet, les tueuses en série américaines représentent 16% de l’ensemble des tueurs en série répertoriés entre 1826 et 1995 (soit 62 femmes). Cette rareté peut expliquer le manque d’études sérieuses consacrées à la criminalité au féminin, et a la tueuse en série en particulier. Pourtant, elles ont causés la mort de près de 500 personnes. Minimum. Le caractère discret de leur passage à l’acte laisse supposer un très grand chiffre noir, même si les techniques scientifiques modernes ont permis un repérage plus efficace de ces femmes.

Les femmes tueuses en série commencent à tuer à l âge de 25 ans en moyenne. Concernant leur histoire personnelle, les tueuses en série sont généralement issues de famille dysfonctionnelles, dans un environnement économique modeste ou pauvre. Beaucoup ont subi des maltraitances et ont été abusées dans leur enfance. (Frei A, Völlm B, Graf M, Dittmann V, 2006). Harold Schecter, co-auteur de "The A-Z Encyclopedia of Serial Killers", remarque : « Les tueurs et tueuses en série ont des personnalités psychopathiques. Il leur manque les bases des émotions humaines, y comprit le remords. Les autres êtres humains ne sont pour eux que des objets qu’ils utilisent pour leur besoin ». En effet, l’émotion ne guide les actes des tueuses en série que très rarement. Peu sont impulsives. Pour la plupart, elles préméditent et planifient leurs crimes méthodiquement et font des arrangements après le meurtre. Elles n’éprouvent aucun remord, ni empathie pour les victimes. Pourtant, elles font la différence entre le Bien et le Mal. Elles sont souvent assez intelligentes (Déborah Green et Charlène Gallego avaient toutes deux un QI proche de 160) et manipulatrices. Leurs crimes sont souvent dissimulés et elles demeurent souvent au dessus de tout soupçon : Ce sont des « ménagères de moins de 50 ans » tout ce qu’il y a de plus classique. c’est pourquoi celles qui s’engagent dans la voie du meurtre en série perdurent très longtemps et font de nombreuses victimes avant d’être confondues.

Une étude de Kelleher & Kelleher (86) démontre que les femmes tueuses en série sont plus prudentes, précises, méthodiques et discrètes que les hommes lorsqu’elles commettent leurs crimes. Elles y parviennent également mieux : les Kellher ont établi que la femme tueuse en série sévissait en moyenne, pendant 11 ans, alors que son homologue masculin en moyenne 4 ans.

S’agissant de leurs motivations, les tueuses en série se distinguent également des hommes. Le mobile le plus communément identifié est le gain matériel ou autre gratification extrinsèque (74%), mais elles peuvent également tuer par vengeance ou jalousie (24%), par désir de contrôle et de pouvoir (13%), par amusement et excitation (11%) ou par motivation sexuelle (10%)(Criminal Behaviour and Mental Health, 2006). Ainsi, les motivations sadiques ou sexuelles sont plutôt rares chez les femmes.

Quant aux victimes, les femmes tueuses en série s’attaquent dans près de 75 % des cas à quelqu’un qui leur est familier : famille, ami, relation de travail… Dans les rares cas où elle se retourne contre un étranger, elle choisira une personne qui peut être dominé facilement, comme une personne âgée à sa charge ou un enfant selon Jeffrey S. Adler (2003).

Les femmes utilisent en majorité le poison pour tuer (80%)(Hickey (1986), Wilson and Hilton (1998), puis une arme à feu (20%). En troisième position vient le "matraquage" (un coup violent sur la tête), puis la suffocation, l’arme blanche et enfin la noyade.

Kelleher (1998), a établi une classification sexo-spécifique des tueuses en série, en se fondant sur le mobile des crimes : la « Veuve Noire » ; l’ « Ange de la Mort » ; les prédatrice sexuelles; vengeance; but lucratif; équipe de tueurs ; les psychotiques ; ou inexpliqués et non résolus.

VEUVES NOIRES :

Emprunté à l’araignée venimeuse, ce surnom s’applique aux femmes qui tuent leur mari, leur amant, leur parent, et parfois même, leur propres enfants, par profit ((argent obtenu grâce aux assurances-vie ou aux héritages) ou par jalousie. La majorité des femmes que l’on pourrait qualifier de « tueuses en série » entrent dans cette catégorie. Elles sont très organisées et leurs crimes sont prémédités. Il n’est pas rare, lorsque le mari décède, que la "Veuve Noire" déménage dans un endroit totalement différent, parfois très loin, où elle change de nom, de personnalité, et se créé un nouveau passé totalement inventé. Les effusions de sang sont rares chez les « veuves noires », elles commettent leurs crimes de manière totalement cachée (87% implique l’utilisation de poison) et tentent de simuler une mort naturelle. Selon Kelleher et Kelleher (1998), la majorité des "Veuves noires" commencent à tuer vers 30-35 ans et restent généralement actives une décennie avant d’éveiller les soupçons. Elles tuent une moyenne de 6 à 13 victimes.

ANGE DE LA MORT

Les « Anges de la Mort » tuent les personnes dont elles doivent s’occuper (exemple de Graham Gwen et Catherine Wood). Le plus souvent, elles passent à l’acte dans les hôpitaux ou les maisons de retraite (lieux de travail). Ces femmes sont motivées principalement par une volonté de contrôle. Elles ont un choix de vie ou de mort sur leur victime, ce qui leur donne un sentiment d’omnipotence. Elles tuent rarement pendant plus de 1 ou 2 ans car elles ont tendance à se vanter de leurs exploits. Leurs crimes revêtent un aspect altruiste ou héroïque. Elles tuent pour mettre un terme à la souffrance d’un plus faible (personne âgée, enfant, patient ou proche) ou provoquent la mort afin de tenter de sauver la victime in extremis et de s’en vanter.
Elles aussi utilisent généralement du poison.

LES EQUIPES DE TUEURS

Kelleher (1998) précise que dans les équipes de tueurs, les femmes sont souvent, mais pas toujours, dominées par un homme brutal et pervers. (Exemple de Karla Homolka, au canada, et de Monique Olivier, en France.) Ces femmes deviennent ainsi des rabatteuses de victimes et des complices actives dans les meurtres commis.

S’intéresser aux femmes tueuses en série demeure périlleux, et ce, pour plusieurs raison. Tout d’abord, la prévalence de crime commis par des tueuses en série entraine un déficit sur les études en la matière (principe de « too few to count »). En effet, si l’on considère que selon les chiffres officiels, il y a eu environ 500 victimes sur 170 années, on peut en déduire qu’il y a 3 victimes de tueuses en série par ans (environ) à travers le monde. Ensuite, le caractère caché de ce type de criminalité et le faible taux de résolution des homicides empêche une réelle représentativité du phénomène. Finalement c’est ce manque de « clientes » qui ne permet pas d’établir des programmes spécifiquement adaptés à ce type de criminelles. La relation d’aide apparait ainsi, biaisée.

Sur le traitement judiciaire, il apparait que dans plus de 95 % des cas, les tueuses en série sont jugées responsables de leurs actes. (Bourgoin S., 2004) Dans toutes les recherches que j’ai effectuées, les tueuses en série qui ont été arrêtées et jugées, ont été condamnées « au mieux », à la prison à perpétuité. Bien que le meurtre en général, ne soit pas un crime récidivé, le nombre de victimes occasionnées par les tueuses en série suggère une certaine dangerosité et une probabilité de récidive assez conséquente. Les tueuses en série ne semblent donc pas profiter d’un système paternaliste, quant à la sévérité de leur peine.

A noter que ces cinquante dernières années ont vu apparaitre une très grosse augmentation de ce type de criminelles (29 ont sévi entre 1970 et 1995). Mais l’évolution semble artificielle, il s’agirait plutôt d’une augmentation de la reconnaissance de ces femmes, notamment grâce a l’avènement des techniques scientifique et de la connaissance medico légale, mais aussi, de la remise en cause partielle de l’image traditionnelle de la femme.
BIBLIOGRAPHIE

Adler Jeffrey S. (2003) The journal of criminal Law and criminology

Bourgoin Stephane, 1994, Femmes Tueuses, Ed. Fleuve Noir

Bourgoin Stephane, 2004, « Le livre noir des serial killers », Editions Grasset

Douglas, J., Burgess, A., Burgess, A., & Ressler, R. (1992). Crime Classification Manual. Lexington, MA:Lexington Books.

Frei A, Völlm B, Graf M, Dittmann V., 2006, Criminal Behaviour and Mental Health , Female serial killing: review and case report

Friedrich Nietzsche, 2006, Serial killer typology

Hickey EW (1986) The female serial murderer 1800–1986. Journal of Police and Criminal Psychology

Hickey (2005), Serial murderer and their victims, Wadsworth Publishing Company

Kelleher MD, Kelleher CL (1998) Murder Most Rare: The Female Serial Killer

Marlow J., « Tueuses en Série, Meurtrières de sang Froid », 2009, Editions Musicbooks

Martin A.S , Vital-Durand B, 2009 Femmes serial killers : Pourquoi les femmes tuent ? Ed Balland

Montet L. , Les tueurs en série, que sais-je ?, ed PUF, 2002

Vergès Jean-Pierre, « les tueurs en série », 2007, Toutes les clés, Edition Hachette Pratique

Wilson W, Hilton T (1998) Modus operandi of female serial killers. Psychological Reports 82:495–498.)

http://www.serialkillercalendar.com/Serial-Kilelr-quotes.html
http://societemonde.suite101.fr/article.cfm/serial-killeuses-et-femelles-predatrices#ixzz15qVkrZ7Y

Selon l'article d'André McKibben "La Classification des Agresseurs Sexuels"

INTRODUCTION


Dans son article sur la classification des agresseurs sexuels McKibben nous fait prendre conscience des difficultés de répondre réellement aux besoins des agresseurs sexuels, entre autre à cause de la pluralité des intervenants multidisciplinaires : la prise en charge et le traitement apparaissent discontinus et incohérents (problème de subjectivité, de formation, ou de préoccupation de l’intervenant).


Face à ce constat, il s’interroge sur l’importance et la pertinence d’établir et d’utiliser des modèles de classification structurés méthodologiquement, afin que les intervenants soient plus a même d’aider cette population particulière, vers une réhabilitation efficiente.


A cette fin, l’auteur recense différents modèles de classification afin de faire état des conclusions des recherches en la matière.


Selon l’auteur…


… les modèles de classifications basés sur des critères observables sont incontournables afin de pallier aux difficultés dans la prise en charge et le traitement des délinquants sexuels. En effet, ils permettent de maîtriser davantage l’étiologie et la dynamique de ces délinquants, et ainsi, l’efficacité de l’intervention. Cependant, il préconise de ne pas perdre de vue que les modèles de classifications ne sont jamais définitifs, tant ils sont basés sur des connaissances en constantes évolutions. Enfin, sans nier les nombreuses contributions qu’apportent ces classifications, l’auteur remarque que l’élaboration de telles typologies engendre très souvent des problèmes méthodologiques. Par exemple, l’auteur relève une fréquente absence de critères diagnostiques opérationnels (problème de subjectivité) ; une absence de vérification de la fiabilité interjuges – qui ne permet pas d’assurer la concordance entre les jugements ; des problèmes d’étanchéité des sous titres (qui ne permettent pas le recoupement entre les catégories), ainsi que des problèmes d’exhaustivité.


Ainsi, McKibben analyse les différents modèles de classification des agresseurs sexuels, qu’il distingue selon l’âge des victimes : typologie de violeurs et typologies de pédophiles.


Modèles de classification des violeurs


Remarquant les similarités de certains sous types de catégories, notamment quant à la motivation et l’affect, McKibben établit une synthèse des typologies de violeurs à partir de 4 thèmes récurrents (la recherche de pouvoir, la rage, le sadisme et le comportement antisocial). Il fait également état des catégories qui ne font donc pas consensus parmi les chercheurs, en raison de leur manque de représentativité parmi l’ensemble des délinquants sexuels, ce qui empêche une caractérisation efficace.


Afin d’expliciter les différentes caractéristiques des 4 grands types de violeur, l’auteur prend tout d’abord appui sur la classification de Groth, car elle apparaît comme la plus familière aux intervenants. Il ressort que le violeur animé par la recherche du pouvoir affirme sa supériorité et sa virilité, par la soumission de sa victime dont il attend une admiration, voire une quasi-gratitude. Le violeur animé par la rage commet son crime dans le but de dégrader et d’humilier la victime. Le violeur sadique, quant à lui, érotise l’agression et trouve sa gratification sexuelle dans les mauvais traitements infligés à la victime. McKibben constate que le violeur antisocial est totalement absent de la typologie de Groth. Il est pourtant décrit par tous les autres auteurs (Guttmacher, Cohen, Rada…), comme un individu dont le crime est davantage le résultat d’une problématique anti sociale que sexuelle.


L’auteur remarque ainsi certaines similitudes, entre les types de violeurs décrits dans la typologie de Groth, et celle d’autres auteurs, comme Guttmacher, Cohen…. Par exemple, le violeur animé par la rage de Groth, s’apparente, au violeur « assaultive » de Gebhard ou au « displaced agression typerapist » de Cohen.


Même si leur pertinence reste d’actualité, ces modèles de classifications ont évolué ces dernières années, principalement grâce au travail du Massachussetts Treatment Center for Sexual Offenders. Leur nouvelle classification, plus structurée sur le plan méthodologique grâce à des critères bien définis, apparaît comme plus fiable car elle permet également de pallier à divers problèmes vus précédemment. Ainsi, la typologie de Knight et Prentky (1990) est basée sur une classification des violeurs en fonction de leur motivation primaire et de l’affect prédominant au moment du délit (opportunisme, rage indifférenciée, motivation sexuelle et motivation vindicative). Les sous types sont ainsi basés sur des critères bien définis et modulés en fonction de l’incidence des facteurs « secondaires » (comme les problèmes de consommation, les troubles mentaux…).


McKibben va également s’intéresser à une autre catégorie d’agresseur sexuel : le pédophile.


Modèles de classification des pédophiles


Contrairement aux classifications de violeurs, n’y a pas de consensus entre les auteurs, quant aux critères utilisés pour établir celle des pédophiles : caractéristiques de l’agresseur pour les uns (âge, personnalité, état mental…) ; caractéristiques de la victime et niveau de violence pour les autres.


McKibben débute également son analyse par le modèle de Groth, qui établit sa classification des pédophiles en fonction du niveau de violence utilisée par l’agresseur. Ainsi, il différencie l’attentat à la pudeur du viol. Tandis que le premier suppose la séduction ou la persuasion, et la manipulation d’un enfant investi positivement, dont l’agresseur recherche une réciprocité de la relation ; le second suppose l’utilisation par l’agresseur, de la menace ou la force physique, a des fins de domination ou de soumission d’un enfant investit négativement, ou par hostilité). L’attentat à la pudeur est lui-même divisé selon les concepts de fixation (persistance des contacts) et de régression (tardiveté de l’attrait pour les contacts avec des enfants et présence de désinhibiteurs et d’élément(s) déclencheur(s)). Le viol, lui, est divisé selon 3 dynamiques : colère (vengeance par l’humiliation), puissance (pouvoir et supériorité par le contrôle) et sadisme (satisfaction sexuelle par érotisation de l’agression).


Cette théorie demeure pertinente malgré une absence de critère véritablement précis. Une théorie plus moderne a cependant tenté de pallier à cette difficulté : le modèle de classification des pédophiles de Knight, Carter et Prentky. L’apport principal de ce modèle par rapport aux autres est qu’il éradique les problèmes liés à l’interprétation des critères classificateurs. En effet, ce modèle a été établi sur la base d’un échantillon très précis d’individus, dont les délinquants et les victimes, ainsi que le délit en lui-même était nettement caractérisé (en l’espèce, uniquement les agressions sexuelles avec contact physiques et non incestueuses, commises par des majeurs de 14 ans, sur des victimes mineurs de 16 ans avec lesquelles ils avaient au moins 5 ans d’écart).
Ce modèle est basé sur 2 axes : le degré de fixation et la quantité de contact. Le degré de fixation est la force et la persistance de l’intérêt sexuel pour l’enfant. Elle se détermine entre autre selon le nombre de contacts sexuels avec des enfants sur 6 mois minimum, ou sur la continuité des relations avec des enfants (contacts sexuels et non sexuels). Le degré de fixation dépend également du niveau de compétence sociale (stabilité professionnelle, intime, amicale ; dans l’engagement parental ou engagement social) ; L’axe II, « quantité de contact », aborde la question de la fréquence des contacts sexuels avec des enfants.


Cela permet de différencier les pédophiles pour qui le contact sexuel apparaît a la suite d’un surinvestissement de l’enfant, ou qui ont eu au moins 3 contacts sexuels avec le même enfant (grande fréquence de contact) de ceux pour qui le contact avec des mineurs n’est pas sur une habitude de vie, et n’apparait que ponctuellement (faible fréquence de contact).


Il s’en suit une recherche de la motivation (interpersonnelle vs narcissique), chez les sujets ayant une grande fréquence de contact, tandis que c’est le niveau de violence (déterminé par la présence de blessures) qui sera analysé chez les sujets ayant une fréquence faible quantité de contact. Finalement, la violence réduite ou élevée est analysée sous le prisme du sadisme.


L’auteur conclut en affirmant que les nouveaux modèles basés sur une base statistique et non empirique, ainsi que sur une approche multifactorielle, confèrent une plus grande validité aux types proposés. D’autre part, l’exposition médiatique ainsi que les révélations des auteurs d’agressions sexuelles, offrent une plus grande finesse des modèles. Ceux-ci permettent alors une avancée majeure dans l éducation du personnel, et le traitement des agresseurs.